Le jour du Lion Ailé et le comite de défense du système nerveux fragilisé




Ce blogue vous présente quelques paragraphes tirés de l’ouvrage « Le jour du Lion Ailé », de Silo. Vous pouvez vous procurer l’ouvrage en visitant le site de Henri Oscar Communication.



Le jour du lion ailé

Les équipements et logiciels de réalité virtuelle se vendaient bien. Les étudiants en histoire et en sciences naturelles furent les acheteurs qui en profitèrent le plus. Mais la demande du grand public augmentait car celui-ci préférait sa dose de divertissement à de grandes excursions aux pyramides égyptiennes ou dans la flore et la faune amazoniennes. Il était possible de faire des voyages en solitaire, en groupe ou guidés ; cependant, beaucoup préféraient disposer d’un sélecteur d’options qui apparaissait en bougeant simplement un doigt. On disposait d’un riche catalogue. On était passé des adaptations d’anciens films, dans lesquels les protagonistes étaient les utilisateurs eux-mêmes, à la transposition de jeux vidéo qui rendaient possible le combat dans l’espace ou des aventures avec les vedettes de l’époque. C’était comme participer dans une bande dessinée ou dans un dessin animé, foisonnant de stimuli si réels que les infarctus firent nombreux quand certains fanatiques de la terreur utilisèrent des programmes déconseillés par le Comité de Défense du Système Nerveux Fragilisé. Les ordinateurs admettaient les programmes les plus absurdes et dans cette atmosphère apparurent des pirates qui introduisirent des virus virtuels provoquant des dédoublements de personnalité et des accidents psychosomatiques. Il était si simple de se mettre un casque et des gants, de mettre en marche l’ordinateur et de choisir un programme que les enfants le faisaient quotidiennement pendant les heures consacrées aux voyages.


Comité de Défense du Système Nerveux Fragilisé

Dans le service, tout le monde utilisait des noms de guerre. C’était une pratique aseptique. Alpa organisait le planning et supervisait le Projet, coordonnant les activités entre les membres d’une équipe qui s’était formée au fil des années. Elle avait été recrutée dans les Alpes, à cause de sa curieuse façon d’entraîner des skieurs de haut niveau. Alors que d’autres professeurs insistaient sur l’effort physique soutenu, elle réunissait ses élèves dans une salle dans laquelle elle projetait encore et encore les images du slalom géant ou du grand tremplin. Après avoir présenté le décor et le parcours de chaque port, elle plongeait la salle dans l’obscurité et demandait que les participants imaginent à plusieurs reprises chaque mouvement et chaque déplacement dans la neige. Parfois, elle accompagnait cette pratique d’une douce musique qui par la suite, durant les heures de sommeil, inondait le refuge.  Et il était arrivé que certains qui n’était jamais sortis sur les pistes avant la compétition se soient déplacés ce jour-là comme s’ils avaient vécu à cet endroit.


Ténétor III entendit parler d’Alpa lors d’un commentaire effectué dans une vidéo spécialisée sur les sports d’hiver. Intrigué par son cas, il se rendit à Sils Mais et, là-bas, il prit contact avec elle. Séguidor était le dernier membre incorporé, chargé du personnel de technologie avancée. Avec Huron et Faro, ils formaient un groupe qui ne pouvait se rassembler que grâce à l’attention de l’Ineffable Jalina, particulièrement douée pour la création de relations humaines douces. Sans aucun doute Ténétor III, en qualité de spécialiste en communication, était le nerf d’une activité dans laquelle Alpa définissait chaque cas en mettant en avant l’accomplissement d’objectifs et de chronogrammes. L’équipe s’était formée en tant que section du Comité de Défense du Système Nerveux Fragilisé et, comme Ténétor était précisément le directeur de cette institution, le groupe put agir sans difficultés.


Le Projet

À la fin du XXe siècle, certains scientifiques, dirigés par un obscur fonctionnaire, étaient arrivés à la conclusion que dans quelques décennies, 85% de la populations mondiale présentait un analphabétisme fonctionnel. Ils calculèrent que l’analphabétisme primaire serait éradiqué dans peu de temps, tandis que de grandes masses humaines écarteraient progressivement les livres, les revues et les journaux en faveur de la télévision, des vidéos, des ordinateurs et des projections holographiques. En soi, cela ne présentait pas un grand inconvénient, étant donné que l’information continuerait de circuler en plus grand quantité et à une vitesse croissante jamais connue à aucune autre époque. Mais l’augmentation de données déstructurées aurait non seulement un impact sur les individus isolés, mais finirait en plus par influencer tous les schémas du système social. Du point de vue de la spécialisation, les perspectives étaient intéressantes, étant donné que l’on utilisait un travail analytique et séquentiel suivant le schéma des ordinateurs. Cependant, l’inaptitude à établir des relations globales cohérentes se ferait de plus en plus sentir.


Le jour du Lion ailé est une succession d’histoires, de récits et de contes fantastiques. Passant habilement de la réalité à la fiction, mais osant par ailleurs le chemin de la fiction à la réalité, l’auteur nous promène de suspensions en points de suspension ...


Suspension du regard, suspension des sens et des corps, défiant les lois de la gravité, jusqu’à la suspension du temps même ; et points de suspension pour laisser la voie ouverte à l’imagination et à la réflexion.

L’ouvrage Le Jour du Lion Ailé a reçu le prix de littérature poétique en 1997 en Italie.
Procurez-vous l’ouvrage en cliquant sur le lien : Le jour du Lion Ailé

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Références:

Silo, Le jour du Lion Ailé, Collection Nouvel Humaniste, Éditions Références, Paris, France 2006. 
Textes tirés des pages 91, 92, 93.

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