La compassion constitue la base de toute croissance


«J'ai appris ceci aujourd'hui: quand l'être humain ne pense qu'à ses intérêts et à ses problèmes personnels, il porte la mort dans l'âme et tout ce qu'il touche meurt avec lui» (tirée de l'expérience guidée l'Action Salvatrice)





Dans ce blogue, nous allons parler du processus compulsif de concentration que génère des conduites d’individualiste des populations. Ces conduites sont promues dans nos sociétés de consommation. Il me semble que présentement l’individualisme devient de plus en plus dommageables pour les êtres humains, son milieu, et l'environnement.

Par ailleurs, il est primordial de comprendre que nos expériences sont «formatées» du point de vue du paysage humain dans lequel nous nous sommes développés et dans lequel nous avons grandis. Toute personne, née, éduquée, et ayant évoluée dans une société de consommation a subi son impact et sa propagande. Tous sont «formatés» à un monde pour-soi «au sens de nutrition personnel».  

Je précise, je suis un consommateur, j’avale, et s’il le faut j’avale l’autre, voire je le détruis pour satisfaire ma propre grande panse. En fait, l’être humain s’est transformé en consommateur et pense que tout se termine en lui et que tout est en fonction de lui. 

Contrairement, à ce que plusieurs peuvent penser, il ne s’agit pas que de problèmes à résoudre dans la psyché de chacun. En effet, il y a des gens qui pensent avoir beaucoup de problèmes personnels et qui, à cause de leurs problèmes, ne font rien pour les autres. Mais se retrouvent souvent chez les psychanalystes. Il est extraordinaire de voir à quel point les gens ayant un bon niveau de vie sont dans l’impossibilité d’aider les autres et d’aller vers les autres.

Donc si nous revenons à notre idée de départ, il est d’une importance capitale de comprendre que nous sommes au prise avec des conduites et un paysage humain ayant à sa base un processus compulsif de concentration qui génère beaucoup de problèmes personnels et sociaux.

C’est cet enfermement, cet individualisme chronique, cette performance à tout prix, et ce constant retour à des actions vers soi-même qui mènent au déficit de compassion et éventuellement à la désintégration totale de l’être humain, et des sociétés. L’enfermement et l’individualisme chronique contamine l'être humain et son milieu.

Par ailleurs, la compassion part de l’idée que l’action ne finit pas en soi-même mais parvient à l’autre, c’est un mode qui inverse le processus de concentration. C’est l’action de «déconcentration » d'ouverture.

Pourquoi parler de la compassion ?
Parce qu’il me semble que pour des millions de personne à travers le monde, il est fondamental que leurs activités ne s’arrêtent pas en eux-mêmes mais s'oriente vers les autres. En effet, de nombreuses personnes se mettent en marche dans des activités dès qu’elles y trouvent un sens et une justification intérieure.

Mais pourquoi certaines personnes agissent-elles au-delà de l’attente d’un retour de leur action désintéressée, c’est quoi ça? Plusieurs personnes se disent qu’elles sont folles. Mais qu’est-ce qu’elles ont dans la tête pour agir de manière si étrange? Car du point de vue de la société de consommation il s’agit d’un comportement atypique voire suspect. Tous les systèmes quels qu’ils soient sont construits sur le même principe : «le consommateur » - ainsi l’idée que quelque chose de significatif puisse sortir «d’une personne» et sans rétribution est pratiquement impossible!

En fait, c’est le paysage humain et les expériences personnelles des individus qui leurs signalent ces conduites «formatées». La conduite la plus répandue dans nos sociétés de consommation c’est « ce circuit qui se réalimente constamment», mais il n’y a aucune sortie!

En effet, avec le modèle de l’individualisme chronique et le culte de performance, la population est en train de devenir totalement névrotique. Les symptômes de certains malaises sont observables partout ; la croissante vertigineuse des maladies mentales, des crises de paniques, des burnsout, etc.

Mais il doit exister une sortie ? Il n’y a une sortie à tout ces malaises.. l’acte de compassion. L’acte de compassion est le seul qui permet à l’être humain de se libérer de la souffrance, de se libérer de la névrose. L’acte de compassion se retourne vers les autres pour les aider. L’être humain apprend en faisant des choses, il peut apprendre la bonté, il peut apprendre la cruauté. C'est à chacun de nous de choisir ..   

Mais, il me semble nécessaire de sauter par-dessus nos problèmes personnels et d’aller vers les autres, c’est là l’acte moral par excellence : « Traite les autres comme tu voudrais qu’ils te traitent ». Ainsi, ce n’est pas la sagesse qui permet à l’être humain de dépasser sa propre souffrance, mais les actes de compassion. Ces actes permettent d’appliquer son énergie dans le monde sans attente. Les actes de compassion nous donnent une certaine amplitude intérieure parce que la compassion constitue la base de toute croissance individuelle et sociale.

Aujourd’hui, je revendique le droit à l’acte volontaire, à cette chose qui a été tellement dévalorisé dans nos sociétés. Je réclame le droit à ceux et celles qui pratiquent à leur façon cette manière d’appliquer leur énergie dans le monde et qui  n’a rien à voir avec le modèle compulsif de consommation dans lequel nous avons été élevé et vivons présentement. Ces actes à la différence des autres, mettre dans le monde une signification intérieure, elles accomplissent une fonction empiriquement «transférentielle». 

Quand on parle d'acte de compassion, on parle d'acte ayant une certaine saveur, une couleur.. comment les reconnaître? S'il nous était possible de refaire 1,000 fois durant la vie nous le ferions.  

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Référence : Lettres à mes amis, Silo. À propos de Silo.Le livre de la communauté pour le développement humain. Ces ouvrages sont disponibles sur le site de l’éditeur.




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Pour ceux et celles qui souhaitent aller vers les autres pour les aider, mais vivent des difficultés et résistances parce qu'ils ou elles n'ont jamais eu l'opportunité de le faire vraiment, je vous invite à lire l'expérience de l'Action Salvatrice. J'ai personnellement réalisé cette expérience guidée à plusieurs reprise et cela m'a permit d'ouvrir des horizons de conscience inattendues. L'expérience l'action Salvatrice est disponible dans le livre de la Communauté pour le développement humain.

Le livre est divisé en deux parties. La première, intitulée “Narrations”, est un ensemble de treize contes et constitue le corps le plus dense et le plus complexe de cet ouvrage. La seconde, intitulée “Jeux d'images”, se compose de neuf descriptions plus simples (mais également plus agiles) que celles de la première partie.


Pour contribuer à ces exercices littéraires, quelques astérisques apparaissent dans les textes; ils marquent des pauses et aident, mentalement, à l'introduction d'images qui transforment le lecteur passif en acteur et en coauteur de chaque description. Cette originalité permet, à son tour, que quelqu'un lise à voix haute (en marquant les interruptions mentionnées) et que les autres, en l'écoutant, puissent imaginer leur propre “nœud” littéraire. Tout ceci constitue la dynamique même de ces écrits alors que, dans des écrits plus conventionnels, cela détruirait la trame du récit.

L'ACTION SALVATRICE

Nous circulons rapidement sur une grande route. A mes côtés, conduit quelqu'un que je n'ai jamais vu. Sur la banquette arrière, deux femmes et un homme me sont également inconnus. La voiture avance au milieu d'autres véhicules qui roulent imprudemment comme si leurs chauffeurs étaient ivres ou devenus fous. Je ne sais pas vraiment si c'est l'aube ou le crépuscule.

Je demande à mon compagnon ce qui se passe. Il me regarde furtivement et répond dans une langue étrange: «Rex voluntas

J'allume la radio, qui me renvoie de fortes décharges et des bruits d'interférences électriques. Cependant, je parviens à entendre une faible voix métallique qui répète de façon monotone: «Rex voluntas... Rex voluntas... Rex voluntas...»

Les véhicules ralentissent, tandis que je vois sur le bas-côté de nombreuses voitures renversées parmi lesquelles se propage un incendie. A peine arrêtés, nous abandonnons tous le véhicule et courons vers les champs au milieu d'une marée humaine qui fuit, épouvantée.

Je regarde en arrière et vois, dans la fumée et les flammes, beaucoup de malheureux pris dans ce piège mortel. Mais je suis obligé de courir, entraîné, bousculé par la course précipitée du flot humain. Dans ce délire, j'essaie en vain d'atteindre une femme qui protège son enfant: la foule lui marche dessus; nombre de gens tombent à terre.

Tandis que le désordre et la violence se généralisent, je décide de me déplacer selon une ligne légèrement diagonale qui me permet de me séparer de la masse. Je me dirige vers un endroit plus élevé, dont l'ascension oblige les gens affolés à ralentir leur course. Beaucoup, sur le point de défaillir s'accrochent à mes vêtements et les mettent en lambeaux.

Je constate que la densité de gens diminue. Je suis parvenu à me dégager, et je continue à présent mon ascension, presque hors d'haleine. En m'arrêtant un instant, je m'aperçois que la multitude suit une direction opposée à la mienne, pensant sûrement qu'en prenant une descente, elle pourra s'échapper plus rapidement. Je constate avec horreur que cette descente est coupée par un précipice. Je crie de toutes mes forces pour prévenir, ne serait-ce que les gens les plus proches de moi, de la catastrophe imminente. Un homme se dégage alors de l'ensemble et court vers moi.

Ses vêtements sont en lambeaux et il est couvert de blessures, cependant le fait qu'il puisse se sauver me procure une grande joie. En arrivant, il m'agrippe un bras et, en criant comme un fou, me montre quelque chose en contrebas. Je ne comprends pas sa langue, mais je crois qu'il veut que je l'aide à secourir quelqu'un. Je lui dis d'attendre un peu, car, pour le moment, c'est impossible... Je sais qu'il ne me comprend pas. Son désespoir me brise. L'homme essaie alors d'y retourner. Je le fais alors tomber à plat ventre. Il reste au sol, gémissant amèrement. 

Pour ma part, je comprends que j'ai sauvé sa vie, et aussi sa conscience, parce qu'il a essayé de sauver quelqu'un, mais qu'il en a été empêché.

Je monte un peu plus haut et arrive dans un champ cultivé. La terre est souple, encore sillonnée de récents passages de tracteur. J'entends au loin des coups de feu et je crois comprendre ce qui se passe. Je m'éloigne rapidement de l'endroit. Quelques instants plus tard, je m'arrête. Tout est silencieux. Je regarde en direction de la ville et y vois briller une lueur sinistre.

Je commence à sentir le sol onduler sous mes pieds et un grondement provenant des profondeurs m'avertit de l'imminence d'un tremblement de terre. Peu de temps après, je perds l'équilibre. Pris d'une forte nausée, je reste à terre, recroquevillé sur le côté mais la tête tournée vers le ciel. Le tremblement a cessé. Je vois une lune énorme, comme couverte de sang.

Il fait une chaleur insupportable et je respire l'air caustique de l'atmosphère. Je ne sais toujours pas si c'est l'aube ou le crépuscule.

Une fois assis, j'entends un grondement croissant. Peu de temps après, le ciel se couvre de centaines d'aéronefs qui, tels de mortels insectes, disparaissent vers un but inconnu.

Près de moi se tient un grand chien qui, regardant la lune, se met à hurler à la manière d'un loup. Je l'appelle. L'animal s'approche timidement. Il arrive à côté de moi. Je caresse doucement son pelage hérissé. Je remarque que par moments son corps est secoué de tremblements.

Le chien me quitte et s'éloigne. Je me lève et le suis. Nous parcourons ainsi un espace rocailleux jusqu'à parvenir à un ruisseau. Assoiffé, l'animal s'élance et commence à boire l'eau avec avidité, mais l'instant d'après, il recule et tombe. Je m'approche, le touche et constate qu'il est mort.Je sens qu'un nouveau séisme menace de me renverser, mais il passe.

Je me retourne et distingue, au loin dans le ciel, quatre formations nuageuses avançant dans un sourd grondement de tonnerre. La première est blanche, la seconde est rouge, la troisième noire et la quatrième jaune. Et ces nuages ressemblent à quatre cavaliers armés chevauchant des montures de tourmente, parcourant les cieux et dévastant toute vie sur terre.

Je cours pour essayer d'échapper aux nuages. Je comprends que si la pluie m'atteint, je serai contaminé. Je poursuis ma course, quand soudain, se dresse devant moi une silhouette colossale: un géant me barre le passage. Menaçant, il agite une épée de feu. Je lui crie que je dois avancer parce que les nuages radioactifs s'approchent. 
Il me répond qu'il est un robot et qu'il a pour mission d'interdire l'accès de cet endroit à toute personne nuisible. Il ajoute qu'il est armé de rayons, m'avertissant ainsi de ne pas m'approcher. Je vois que le colosse se trouve à la frontière entre deux espaces: celui d'où je viens, rocailleux et désolé et un autre, plein de végétation et de vie.

Alors je crie: «Tu dois me laisser passer parce que j'ai accompli une bonne action!
– Qu'est ce qu'une bonne action? me demande le robot.
– C'est une action qui construit, qui concourt à la vie.
– Alors, reprend-il, qu'as-tu fait qui soit digne d'intérêt?
– J'ai sauvé un être humain d'une mort certaine et en plus, j'ai sauvé sa conscience.
Immédiatement, le géant s'écarte. A l'instant même où tombent les premières gouttes de pluie, je saute dans l'espace protégé.

Je me trouve devant une grange, tout près de la maison des paysans. De ses fenêtres émane une douce lumière jaune. Je sais enfin que nous sommes au petit matin.
Lorsque j'arrive à la maison, un homme rude d'aspect généreux, m'invite à entrer. A l'intérieur se trouve une famille nombreuse qui se prépare aux activités de la journée. Ils m'invitent à leur table, garnie d'un repas simple et réconfortant. Et me voilà bientôt en train de boire une eau aussi pure que celle d'une source. Quelques enfants s'ébattent autour de moi.

«Cette fois-ci, me dit mon hôte, vous en avez réchappé. Mais, quand vous aurez à repasser la limite de la mort, de quelle cohérence pourrez-vous vous prévaloir?»
Je lui demande de plus amples explications, car ses paroles me semblent étranges. Il m'explique: «Essayez de vous souvenir de ce que nous appellerons (pour leur donner un nom) de “bonnes actions” faites au cours de votre vie. Bien entendu, je ne parle pas de ces “bonnes actions” que les gens font dans l'espoir de quelque récompense. Vous ne devez vous souvenir que de celles qui vous ont laissé la sensation d'avoir fait à d'autres ce qui était le mieux pour eux... C'est aussi simple que ça. Je vous donne trois minutes pour vous remémorer votre vie et constater quelle pauvreté intérieure il y a en vous, mon bon ami. Et une dernière recommandation: si vous avez des enfants, ou des êtres très chers, ne confondez pas ce que vous voulez pour eux avec ce qui est le meilleur pour eux.» Sur ce, lui et tous les siens sortent de la maison. Une fois seul, je médite les propos du paysan. (*)

Peu après, l'homme revient et me dit: «Vous voyez maintenant comme vous êtes vide à l'intérieur; et si vous n'êtes pas vide, c'est que vous êtes confus. C'est à dire que dans tous les cas, vous êtes vide à l'intérieur. Permettez-moi une recommandation et acceptez-la, parce que c'est la seule chose qui vous servira à l'avenir. A partir d'aujourd'hui, ne laissez plus passer un seul jour sans remplir votre vie.»

Nous nous quittons. De loin, je l'entends me crier: «Dites aux gens ce que vous venez d'apprendre!»

Je m'éloigne de la grange en direction de ma ville.

J'ai appris ceci aujourd'hui: quand l'être humain ne pense qu'à ses intérêts et à ses problèmes personnels, il porte la mort dans l'âme et tout ce qu'il touche meurt avec lui.

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