La pandémie retarde-t-elle notre marche vers la libération ? Et si c'était une opportunité historique pour un changement social et humain ?

La pandémie retarde-t-elle notre marche vers la libération ? Et si c'était une opportunité historique pour un changement social et humain ? « Est humaniste celui qui lutte contre la discrimination et la violence en proposant des issues qui permettent à l’être humain de manifester sa liberté de choix. » Depuis les deux dernières années, la pandémie a changé plusieurs choses dans la société et dans nos vies. Mais, il semble que dans plusieurs pays à travers le monde certains leaders, gouvernements profitent de la crise sanitaire pour élargir leur pouvoir en restreignant certains droits et libertés des citoyens. En fait, en arrière-plan de la crise sanitaire mondiale, nous retrouvons de plus en plus de gens qui se questionnent sur le contrôle du tout social par l’État et par les ploutocrates. Par ailleurs, il me semble évident qu’il faille lutter contre la pandémie et rendre accessible les vaccins à toutes les populations. Mais, nous devons aussi questionner les choix et les actions des politiciens et des ploutocrates. Pourquoi tant de mesures socialement contrôlantes ? En fait, toutes les mesures de restrictions sociales semblent avoir eu un impact sur les mouvements sociaux. En effet, rappelons-nous le paysage social d’avant la pandémie. Nous étions alors devant des opportunités de changements sociaux importants dans plusieurs pays à travers le monde, pensons au mouvement de masse au Liban et au Chili. Au mouvement “Black Live Matters” aux États-Unis et au mouvement #Metoo. Pensons aux soulèvements sociaux dans plusieurs pays Africains et Latino Américain. Pensons au mouvement des Gilets Jaunes en France. Pensons à tous ces millions de jeunes massés dans les rues à travers le monde manifestant contre l’inaction des politiciens face au changement climatique. Avec l’arrivée de la pandémie, les choses ont bien changé. Il est devenu pratiquement impossible d’organiser des actions publiques, des rencontres et des conférences. Il est devenu pratiquement impossible de se déplacer pour rencontrer d’autres groupes dans d’autres pays ou encore d’assister à des événements internationaux. D’autre part, durant la pandémie, nous avons tous observé ce déplacement rapide dans le monde des rencontres sociales en “présentielle physique” vers le mode virtuel. Grâce à la révolution technologique et à internet, qui est maintenant présent partout, nous avons formé de nouvelles habitudes de vie des sociétés et des individus. Grâce à internet nous avons pu maintenir des contacts. Par ailleurs, cette nouvelle réalité a considérablement limité nos mouvements, nos déplacements ainsi que nos actions dans le monde. En fait, pour moi et sûrement la majorité des militants qui travaillent pour un changement social et personnel, la crise sanitaire n’est pas facile à gérer, car nous devons simultanément nous inquiéter de la pandémie et de la perte de nos droits et libertés. Nous devons naviguer vers des solutions qui permettent à tous d’être protégé contre la COVID 19 sans pour autant perdre notre liberté d’action dans le monde. Nous devons rester vigilants et nous assurer que nos droits et liberté sont respectés. Nous devons mettre en marche une pratique de solidarité sociale qui dépasse le moment actuel et qui débouche sur l’avancement d’un processus révolutionnaire. “Par conséquent, il ne suffit pas de subir la pression des conditions opprimantes pour que le changement se mette en marche ; il est aussi nécessaire de se rendre compte qu’un tel changement est possible et qu’il dépend de l’action humaine. Cette lutte ne se fait pas entre des forces mécaniques, ce n’est pas un réflexe naturel ; c’est une lutte entre des intentions humaines. Et c’est précisément ce qui nous permet de parler d’oppresseurs et d’opprimés, de justes et d’injustes, de héros et de lâches. C’est la seule chose qui donne un sens à la pratique de la solidarité sociale et à l’engagement pour libérer les discriminés, qu’ils soient majoritaires ou minoritaires.” (Silo, 1995, p.55) En pleine crise sanitaire nous devons repenser la révolution sociale et humaine La crise sanitaire a fait renaître de vieux questionnements qui sont toujours non résolus chez l’être humain. C’est-à-dire que nous nous retrouvons devant ce tréfonds existentiel qui suit l’être humain depuis des millénaires. Ce sont des questions qui touchent directement l’être humain et qui concerne l’oppression face à la liberté ; la discrimination face à l’inclusion sociale et la résignation face à l’engagement social et personnel. Avant la pandémie, nous avions l’impression que ces anciennes questions et discussions étaient dépassées! Mais avec l’arrivée de la pandémie, nous nous sommes vite rendu compte que ce n’est pas le cas, bien au contraire, on constate qu’en moment de crise, qu'elle soit sanitaire ou non, nos libertés individuelles passent au second plan, tandis que les tendances autoritaristes de certaines de nos institutions reviennent au grand galop.. En effet, cette liberté individuelle et sociale si difficilement gagnée à travers le temps, à travers les révolutions et les luttes de nos ancêtres est constamment remise en question au fils des crises et désastres sociaux, économiques et sanitaires. Nous savons que les limites imposées sur nos droits et libertés créent des barrières à la réalisation de nos projets de changements sociaux et personnels. Mais nous savons aussi que la recherche de la croissance de la vie, comme saut par-dessus les conditions déterminantes, passe évidemment par la révolution sociale et humaine. En fait, en Occident, nos ancêtres ont connu plusieurs révolutions qui ont changé la face du monde. Celles-ci étaient imprégnées de nouvelles idées de liberté, d’égalité et de fraternité. Encore aujourd’hui nous naviguons sur les vestiges des anciennes révolutions. Mais, le monde a changé, les choses ont changé et nous devons repenser la révolution sociale en termes de processus révolutionnaire, un processus qui inclut les thèmes locaux et mondiaux. Chaos destructif et processus révolutionnaire Il est évident que pour des centaines de millions de personnes à travers le monde, leurs conditions actuelles sont totalement inacceptables. Partout à travers le monde, les populations espèrent et souhaitent des changements. Personne ne veut demeurer dans une situation sans issue, sans avoir accès à des services de santé, d’éducation et sans avoir l’accès à un logement, à de la nourriture et à de l’eau de qualité.Il semble évident que les choses vont bouger vers le chaos destructif ou vers un processus révolutionnaire. Ainsi que l’on veuille ou non la révolution ou le chaos, sont déjà enclenchés. Mais assisterons-nous à une lutte entre cultures, entre continents, entre régions, entre ethnies, entre voisins, entre membres d’une même famille ? Assisterons-nous à des guerres interminables entre les ploutocrates ? Irons-nous vers un spontanéisme sans direction, comme des animaux blessés se débattant dans leur propre douleur ? Ou inclurons-nous toutes les différences, bienvenues soient-elles, en direction de la révolution mondiale ? D’autre part, si la liberté de choix existe chez l’être humain, il est alors possible de modifier les conditions qui, dans leur développement mécanique, préfigurent comme catastrophiques. Au contraire, si la liberté humaine n’est qu’un mythe charitable, alors les décisions des individus et des peuples n’auront pas d’importance puisque les événements iront vers la croissance de la vie, simplement et mécaniquement ou bien tout ira vers la catastrophe, le néant, le non-sens. Personnellement, j’affirme que la liberté de la vie humaine et l’intentionnalité sont les deux aspects qui ouvriront la voie à la libération personnelle et sociale. Liberté sous conditions évidemment, mais liberté quand même. Plus encore, je crois que le sens de la vie humaine est par essence liberté, et que cette liberté rejette l’absurde et ce qui est "donné", même quand ce "donné" est la nature elle-même. En fait, c’est cette lutte contre ce qui est "donné", contre la douleur et la souffrance qui a permis le développement de la société et de la civilisation. En somme, si la vie humaine a grandi, ce n’est pas grâce à la douleur et à la souffrance, mais parce qu’au contraire, elle s’est donné les moyens de les vaincre. La vie humaine est cette chose exceptionnelle et qui grandit dans les pires moments. Aujourd’hui tous ces changements inattendus nous amènent à poser sérieusement la nécessité de donner une direction à notre vie. En effet, nous sommes libres de donner ou non une direction à notre vie. Si nous choisissons de donner une direction à notre vie, nous pourrons éventuellement donner une direction à tous ces événements inattendus. Parce que le problème, qui se pose aujourd’hui, est précisément celui du futur du système parce qu’il a tendance à se révolutionner mécaniquement sans qu’intervienne aucune orientation progressive. Par ailleurs, l’orientation des événements dépend de l’intention et de la liberté humaine et échappe au déterminisme des conditions que génère le système. En pleine crise sanitaire, de quelle révolution parlons-nous au juste ? Aujourd’hui, nous parlerons de la révolution sociale. Comment est-ce possible ? C’est possible, puisque les révolutions ont toujours occupé un espace dans l’esprit et l’imaginaire de l’être humain. Aujourd’hui nous avons accès à une technologie qui nous permet de nourrir l’ensemble des populations de la planète. Nous avons accès à une médecine qui nous permet d’offrir des services à toutes les populations. Nous avons accès à des idées et des façons de faire qui nous permettent de travailler pour limiter les changements climatiques. Repenser la révolution sociale passe par l’accès à la santé et l’éducation pour tous. Repenser la révolution passe par l’ouverture à la diversité des idées, des savoirs faire et des actions. Repenser la révolution passe inévitablement par la redistribution des capitaux. Repenser la révolution passe inévitablement par l’accès aux moyens de production par les travailleurs. Nous parlons d’une révolution sociale qui change radicalement les conditions de vie du peuple, d’une révolution politique qui modifie la structure du pouvoir et, finalement, d’une révolution humaine qui crée ses propres paradigmes en remplacement des valeurs décadentes actuelles. Repenser la révolution passe par les intentions humaines de recherche de liberté qui échappent au déterminisme du système. Nous parlons d’une révolution comme “la création d’une façon d’être, par essence différente de tout être non-humain, anti-humain et pas encore complètement humain”. Une révolution qui permet à la forme d’être la plus élevée de prendre place, c'est-à-dire d’un être en plénitude, un être-en-liberté. (Thèse sur “la nécessité d’un concept de révolution”, 1977, La Philosophie et les sciences sociales, Congrès de Morelia, 1975). Nous parlons d’une révolution, ou l’individu est valorisé comme être humain. Et comme nous ne sommes pas isolés, nous parlons d’une révolution qui commence par soi, et s’étend jusque dans la relation aux autres, en les traitant comme nous voudrions être traités. D’une révolution qui permet à chacun de trouver une direction à sa vie tout en cherchant la cohérence entre ce qu’il pense, ressent et fait. Nous vivons en relation immédiate avec les autres et c’est dans ce milieu que nous devons agir et lancer le processus révolutionnaire pour donner une direction favorable à notre situation. Un processus révolutionnaire n’est pas une question psychologique ou intellectuelle qui peut se résoudre isolément dans la tête de quelques individus ; c’est un thème lié à la situation dans laquelle nous vivons. Nous parlons d’un processus révolutionnaire non-violent qui avance à partir de ce qui est positif pour nous et notre milieu immédiat et doit être amplifié dans toute la société. Nous parlons d’un processus révolutionnaire avec d’autres qui vont dans la même direction et en mettant en place les moyens adéquats pour qu’une nouvelle solidarité trouve son cap. Nous parlons d’un processus révolutionnaire bien qu 'agissant spécifiquement dans notre milieu immédiat, ne perd pas de vue une situation globale qui affecte tous les êtres humains et qui requiert notre aide, de la même façon que nous avons besoin de l’aide des autres. Nous parlons d’un processus révolutionnaire qui s’amplifie au fur et à mesure que le système s’affaiblit, c’est-à-dire que les contradictions (qui inverse la croissance de la vie) auxquelles nous sommes soumis s’affaiblissent. Cette idée est importante pour produire des changements dans la direction de la vie, si nous sommes soumis à la contradiction. Nous parlons d’un processus révolutionnaire d’adaptation croissante qui consiste à augmenter notre influence sur le milieu et ce, dans une direction cohérente. Car pour la majorité des personnes se sont l’image et la représentation d’un futur possible et meilleur qui permettent la modification du présent et qui rendent possible toute révolution et tout changement. “Je sens en toi la liberté et la possibilité de te constituer en être humain. Et mes actes trouvent en toi ma cible de liberté. Alors, pas même ta mort n’arrêtera les actions que tu as mises en marche car tu es par essence temps et liberté.” (Silo, 2006, p,34)

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